Marie-Rose Astié de Valsayre (Jéhan des Etrivieres)
[Manuscrit autographe] Contes grivois du XIXe siècle, I : L'Amour à la hussarde
Manuscrit autographe, circa 1880-1895. Page de titre et 16 ff. in-8 anopistographes (environ 22 lignes par page) d'une écriture lisible, avec quelques ratures. Le manuscrit est signé Jéhan des Etrivieres in fine et comporte au titre le véritable nom de l'auteur.
Marie-Rose Astié de Valsayre (1846 ? ou circa 1853 - 190X) fait partie des premières féministes du XIXe siècle. Épouse d'un médecin, le Dr Astié, elle suivit des études de médecine et de pharmacie. Elle fut ambulancière pendant la guerre de 1870 et blessée au plateau d'Avron. Elle fut un temps secrétaire d'Émile de Girardin.
Socialiste allemaniste, elle fut membre de l'éphémère Ligue des Femmes socialistes, elle créa en 1889 la Ligue de l'Affranchissement des femmes (dite "Ligue des femmes"), au nom de laquelle elle demanda l'inscription des femmes sur les listes électorales et se porta même "candidate" lors d'élections municipales et législatives. Elle partcipa aux congrès de la Fédération des travailleurs socialistes de France (FTSF) de Paul Brousse, de l'Union fédérative du centre (UFC) et du Parti ouvrier socialiste révolutionnaire de Jean Allemane. Elle créa et dirigea de 1897 à 1901 "La Femme de l'avenir : journal indépendant, littéraire, scientifique et de défense des intérêts féminins", où elle signe Avricourt.
Elle est connue pour avoir, en 1887, demandé l'abrogation d'une loi de 1800 interdisant aux femmes de porter le pantalon (ou "culotte"). Également escrimeuse aguerrie, sportive, manifestement éprise d'aventure et de coups d'éclats, elle se fit remarquer à de nombreuses reprises et suscita le scandale. Une gravure la représente ainsi en 1886 à Waterloo en train de porter un coup d'épée à une Américaine qui avait osé affirmer que les Françaises étaient de piètres doctoresses, la presse étrangère se fait également l'écho des coups de poings victorieux qu'elle infligea à un homme ivre qui harcelait les femmes dans la rue, elle provoqua en duel et fit grand tapage contre la "maréchale" Booth de l'Armée du salut, elle pétitionna en 1891 contre la basilique du Sacré-Coeur et demanda que "soit fondé, à Montmartre, une société de conférences destinée à combattre acte par acte la fabrique d'hystériques de la butte".
Elle publia plusieurs livres dont, sous le même pseudonyme qu'elle utilise ici, Jéhan des Etrivieres ("pseudonyme [qui] rappelle la mission de régénération transformatrice et fustigatrice que cette dame s'est elle-même imposée", Heylli, Dic. des pseud.), une biographie de Louise Michel, Léonie Rouzade, Eugénie Pierre, Hubertine Auclert... intitulée Les Amazones du siècle (les Gueulardes de Gambetta) (1882), qui était plutôt calomnieuse pour celles-ci, auxquelles elle présenta rapidement des excuses pour les avoir "sottement attaquées". Sous son véritable nom, on lui doit en 1883 un Mémoire sur l'utilité de l'enseignement de grammaire dans l'instruction de la femme : c'est quand on lui refusa de donner des cours gratuits de grammaire aux femmes qu'elle commença à s'engager pour la cause féministe. C'est aussi sous son véritable nom que l'on trouve divers articles et mémoires sur l'instruction des jeunes filles ou sur l'hygiène. Sous le pseudonyme de Jean Misère, elle publia en 1887 Le Retour de l'exilé, un long poème patriotique. Anatole Baju , dans son Anarchie littéraire (1892), la classe parmi les "socialistes". Han Ryner, dans Le Massacre des Amazones, la range parmi les Cantinères. Il lui attribue une plaquette de 15 pp. intitulée Le Secret d'Hermine (épisode de 1870) publiée en 1896 sous le nom de Fernand Marceau.
N'oublions pas, pour conclure, que Pierre Larousse dit aussi d'elle qu'elle était musicienne et qu'elle "publia d'assez nombreuses mélodies, polkas, barcarolles, romances, pleines de sensibilité". Ce même Grand dictionnaire universel la fait naître, le premier, en 1846, ce qui semble inexact puisque les journaux lui donnent 30 ans au milieu des années 1880 et qu'elle-même s'en donne 40 en 1893, un âge de raison selon elle pour être élue sénatrice.
La nouvelle manuscrite que nous proposons peut se résumer ainsi : une jeune femme qui souhaite se lancer dans la carrière littéraire essaie de montrer l'un de ses manuscrits à un colonel des hussards à la retraite qui connaît Balzac et Girardin, mais celui-ci s'avère plus intéressé par les formes de la demoiselle que par sa prose. Elle parut, sous le véritable nom de l'auteur, dans "La Grisette" des 8 et 14 septembre 1895. Le texte lui-même, et cette copie manuscrite, est probablement plus ancien, car Astié semble avoir abandonné le pseudonyme de des Etrivieres après la publication des Amazones en 1882.
Un témoignage littéraire du dernier quart du XIXe siècle émanant de l'une des premières figures du féminisme. Papier fragile.
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