lundi 21 février 2011

Un manuscrit de Marie-Rose Astié de Valsayre, féministe, socialiste, escrimeuse et scandaleuse

Marie-Rose Astié de Valsayre (Jéhan des Etrivieres)

[Manuscrit autographe] Contes grivois du XIXe siècle, I : L'Amour à la hussarde

Manuscrit autographe, circa 1880-1895. Page de titre et 16 ff. in-8 anopistographes (environ 22 lignes par page) d'une écriture lisible, avec quelques ratures. Le manuscrit est signé Jéhan des Etrivieres in fine et comporte au titre le véritable nom de l'auteur.



Marie-Rose Astié de Valsayre (1846 ? ou  circa 1853 - 190X) fait partie des premières féministes du XIXe siècle. Épouse d'un médecin, le Dr Astié, elle suivit des études de médecine et de pharmacie. Elle fut ambulancière pendant la guerre de 1870 et blessée au plateau d'Avron. Elle fut un temps secrétaire d'Émile de Girardin.

Socialiste allemaniste, elle fut membre de l'éphémère Ligue des Femmes socialistes, elle créa en 1889 la Ligue de l'Affranchissement des femmes (dite "Ligue des femmes"), au nom de laquelle elle demanda l'inscription des femmes sur les listes électorales et se porta même "candidate" lors d'élections municipales et législatives.  Elle partcipa aux congrès de la Fédération des travailleurs socialistes de France (FTSF) de Paul Brousse, de l'Union fédérative du centre (UFC) et du Parti ouvrier socialiste révolutionnaire de Jean Allemane. Elle créa et dirigea de 1897 à 1901 "La Femme de l'avenir : journal indépendant, littéraire, scientifique et de défense des intérêts féminins", où elle signe Avricourt.



Elle est connue pour avoir, en 1887, demandé l'abrogation d'une loi de 1800 interdisant aux femmes de porter le pantalon (ou "culotte"). Également escrimeuse aguerrie, sportive, manifestement éprise d'aventure et de coups d'éclats, elle se fit remarquer à de nombreuses reprises et suscita le scandale. Une gravure la représente ainsi en 1886 à Waterloo en train de porter un coup d'épée à une Américaine qui avait osé affirmer que les Françaises étaient de piètres doctoresses, la presse étrangère se fait également l'écho des coups de poings victorieux qu'elle infligea à un homme ivre qui harcelait les femmes dans la rue, elle provoqua en duel et fit grand tapage contre la "maréchale" Booth de l'Armée du salut, elle pétitionna en 1891 contre la basilique du Sacré-Coeur et demanda que "soit fondé, à Montmartre, une société de conférences destinée à combattre acte par acte la fabrique d'hystériques de la butte".



Elle publia plusieurs livres dont, sous le même pseudonyme qu'elle utilise ici, Jéhan des Etrivieres ("pseudonyme [qui] rappelle la mission de régénération transformatrice et fustigatrice que cette dame s'est elle-même imposée", Heylli, Dic. des pseud.), une biographie de Louise Michel, Léonie Rouzade, Eugénie Pierre, Hubertine Auclert... intitulée Les Amazones du siècle (les Gueulardes de Gambetta) (1882), qui était plutôt calomnieuse pour celles-ci, auxquelles elle présenta rapidement des excuses pour les avoir "sottement attaquées". Sous son véritable nom, on lui doit en 1883 un Mémoire sur l'utilité de l'enseignement de grammaire dans l'instruction de la femme : c'est quand on lui refusa de donner des cours gratuits de grammaire aux femmes qu'elle commença à s'engager pour la cause féministe. C'est aussi sous son véritable nom que l'on trouve divers articles et mémoires sur l'instruction des jeunes filles ou sur l'hygiène. Sous le pseudonyme de Jean Misère, elle publia en 1887 Le Retour de l'exilé, un long poème patriotique.  Anatole Baju , dans son Anarchie littéraire (1892), la classe parmi les "socialistes". Han Ryner, dans Le Massacre des Amazones, la range parmi les Cantinères. Il lui attribue une plaquette de 15 pp. intitulée Le Secret d'Hermine (épisode de 1870) publiée en 1896 sous le nom de Fernand Marceau.

N'oublions pas, pour conclure, que Pierre Larousse dit aussi d'elle qu'elle était musicienne et qu'elle "publia d'assez nombreuses mélodies, polkas, barcarolles, romances, pleines de sensibilité". Ce même Grand dictionnaire universel la fait naître, le premier, en 1846, ce qui semble inexact puisque les journaux lui donnent 30 ans au milieu des années 1880 et qu'elle-même s'en donne 40 en 1893, un âge de raison selon elle pour être élue sénatrice.

La nouvelle manuscrite  que nous proposons peut se résumer ainsi : une jeune femme qui souhaite se lancer dans la carrière littéraire essaie de montrer l'un de ses manuscrits à un colonel des hussards à la retraite qui connaît Balzac et Girardin, mais celui-ci s'avère plus intéressé par les formes de la demoiselle que par sa prose. Elle parut, sous le véritable nom de l'auteur, dans "La Grisette" des 8 et 14 septembre 1895. Le texte lui-même, et cette copie manuscrite, est probablement plus ancien, car Astié semble avoir abandonné le pseudonyme de des Etrivieres après la publication des Amazones en 1882.



Un témoignage littéraire du dernier quart du XIXe siècle émanant de l'une des premières figures du féminisme. Papier fragile.

vendu

samedi 12 février 2011

La seule Danse des morts espagnole connue : Libro sotilissimo y provechoso de Juan de Icíar (1555)



[Juan de Icíar (ou Yciar)] - [d'après Hans Holbein]

Libro sotilissimo y provechoso para deprender a escreuir y contar el qual lleua la misma orden que lleua un maestro con su discipulo en que estan puestas las cinco reglas mas principales de guarismo, y otras cocas sotiles y prouechosas (...) 



Sl [Saragosse (Zaragoza)], sn, 1555. 17,3 x 12,5 cm, in-8, 21 ff. n. ch. (de 28) [A-C8 (manque Aii - Biii et Bviii remplacés par un feuillet manuscrit, Cviii remplacé par 2 ff. ms), D4 (manquent Dii-Div)], plaquette extraite d'une reliure précédée d'un feuillet manuscrit en espagnol sur Juan de Iciar et Jean de Vingles, tranches rouges.



Seul livre espagnol contenant une danse des morts et l'un des plus rares spécimens de la gravure sur bois en Espagne. 

Première partie seule, celle sur l'alphabet, car le livre devrait normalement être suivi d'une partie concernant l'arithmétique. Après la page de titre (fort trompeuse, car il ne s'agit pas d'une méthode d'écriture mais d'un alphabet gravé) et l'épitre dédicatoire à Diego de los Cobos, on trouve de petites illustrations bibliques (manque le feuillet comportant la fin de la dédicace et 6 petites figures bibliques) puis la représentation des quatre Évangélistes.



Vient ensuite un alphabet représentant des figures de l'Ancien testament (1 vignette par page, avec le texte imprimé en dessous). Les figures de celui-ci sont inspirées de celles de Hans Holbein pour Icones Historiarum Veteris Testamenti.



Un deuxième alphabet suit : il s'agit d'une danse des morts, sans texte imprimé, comportant deux vignettes par page. Celles-ci sont inspirées par les Simulachres et historiees faces de la Mort de Holbein (la lettre M est également utilisée comme lettrine en tête de la dédicace). 






Le premier alphabet biblique est ensuite répété, mais cette fois-ci sans texte imprimé et avec deux lettres par page. Viennent enfin 8 petites figures bibliques (ici absentes).




Toutes les pages comportent un large encadrement gravé sur bois qui varie selon quatre modèles différents. Les pages des deux premiers alphabets comportent en outre des culs-de-lampe variés. Cette édition est d'une insigne rareté. Brunet (III, 1068) décrit l'exemplaire de la bibliothèque de Richard Heber (bibliotheca heberiana), qui se trouve désormais à la bibliothèque de New York. La Bibliothèque nationale de Catalogne possède également un exemplaire de cette édition mais, comme le nôtre, sans la partie sur l'arithmétique. Il existe une édition de la première partie seule qui porte le titre Libro en el qual hay muchas suertes de letras historiadas con figuras del viejo Testamento y la declaracion dellas en coplas, y tambien un abecedario con figuras de la Muerte.



On a à un moment attribué la paternité de la gravure à Jean de Vingles, celui-ci ayant collaboré avec Juan de Icíar pour son célèbre et rare  Arte subtilissima por la qual se enseña a escreuir perfectamente (1550). L'attribution à Icíar (autrefois orthographié Yciar) n'est pas certaine non plus : elle repose sur le fait que cet alphabet a souvent été relié avec le traité d'écriture de 1550 et que le livres sort également des presses de Saragosse. 



Un exemplaire qui ne comptait que 15 feuillets, celui du célèbre bibliophile Nicolas Yemeniz, fut adjugé 900 francs en 1867 (Cat. N. Yemeniz, n° 641). Exemplaire modeste auquel il manque 7 feuillets ainsi que la moitié environ de la page de titre et de son verso (dédicace), restaurations marginales à quelques feuillets, manque restauré au feuillet B, sans atteinte à la gravure d'alphabet, quelques rousseurs. 

vendu

jeudi 10 février 2011

Une Histoire de la Sainte Russie de Gustave Doré entièrement coloriée



Gustave Doré

Histoire pittoresque, dramatique et caricaturale de la Sainte Russie 
d'après les chroniqueurs et historiens Nestor, Nikan, Sylvestre, Karamsin, Ségur, etc., commentée et illustrée de 500 magnifiques gravures par Gustave Doré gravées sur bois par toute la nouvelle école sous la direction générale de Sotain‎‎



‎Paris, J. Bry aîné, 1854.



31 x 23 cm (R), in-4, 2 ff. n. ch. (faux-titre, titre) - 207 pp. imprimées au recto seul toutes contrecollées sur papier et montées sur onglet, reliure de plein vélin, chaque plat couvert d'une large composition peinte signée E. Bourdy, dos lisse avec titre encré et un petite composition peinte.‎



‎Edition originale.



Exemplaire unique, entièrement colorié aux crayons de couleur (probablement vers 1930). La page 89 comporte la tache rouge caractéristique du premier tirage. En revanche la tache rouge de la page 97, autre marque de premier tirage, semble avoir été reconstituée par l'amateur éclairé qui a colorié l'exemplaire (qui est probablement le même que celui qui a peint les plats, un certain E. Bourdy, que nous ne sommes pas parvenus à identifier).




Un exemplaire fort curieux d'un Gustave Doré rare, considéré comme l'un des incunables de la bande dessinée. (VICAIRE, III, 286)‎




vendu