Hollard, Michel (1898-1993, Résistant français)
Manuscrit autographe de son discours devant les cendres de Robert Desnos le 17 octobre 1945 et Lettre autographe signée à Youki Desnos
1) Lettre autographe signée à Youki Desnos, 1 1/2 pp. in-8, datée du 20 octobre 1945, sur papier à en-têtre du Gouvernement Provisoire de la République Française : comme elle l'a demandé, il envoie "les notes [qu'il] a lues mercredi dernier, devant l'urne qui recélaient les cendres de notre Robert", il regrette de ne pas pouvoir assister à la cérémonie (du 24 octobre 1945) et il charge le lieutenant Rubenach d'y assister (enveloppe conservée, au verso de laquelle Youki Desnos a noté l'adresse de Jean Dubuffet à l'époque).
2) Manuscrit autographe de 3 pp. in-12, détachées d'un carnet :
Robert mon camarade qui as répondu, dès qu'il est venu, à l'appel du Devoir.
Robert, avec moi les compagnons du réseau "AGIR" viennent t'apporter leur message.
Tu avais la sécurité, tu as préféré le risque.
Tu avais la vie et le confort, tu les as délaissés pour nous aider à retrouver les Raisons de Vivre.
Tu avais le Bonheur, tu avais l'Amour - et nous savons combien ils t'exaltaient !
tu n'as pas voulu en profiter au prix de la servitude.
Avec nous tu as lutté. Fidèlement, obstinément, avec une efficacité que le commandement connaît bien, tu as épaulé notre effort contre l'envahisseur ; et cet appui, l'ennemi aurait bien voulu le découvrir. Les camarades pris avec moi le 5 février 1944 savent avec quelle volonté sauvage il s'est évertué à m'en faire désigner l'auteur sous la torture. Ils savent, comme toi, que je ne t'ai pas trahi et qu'après notre disparition, il ne tenait qu'à toi de reprendre paisiblement une vie redevenue sans secousse.
Tu n'as pas voulu de cette désertion. Tu es rentré dans l'action jusqu'à ce que tu sois atteint à ton tour, jusqu'à ce que toutes tes forces y eussent passé.
Alors, tu as succombé, et nous ne devions plus te revoir.
Mais, Robert, tu ne nous as pas quittés ! Invisible, tu restes parmi nous, dans nos coeurs, et dans les tâches qu'il nous reste à accomplir, tu seras là, témoin affectueux, pour nous rappeler à notre devoir.
Oui, Robert, tes camarades essayeront de ne pas être indignes de ton exemple.
De notre coeur serré, de toute notre volonté fervente, nous te disons : "Au Revoir".
L'un des rares témoignages écrits, si ce n'est le seul, sur l'activité de résistant de Robert Desnos. Celui-ci est inconnu des biographes (de Marie-Claire Dumas notamment, qui s'est appuyée sur des sources orales, notamment sur le témoignage du fils de Michel Hollard, Vincent) et inédit.
Michel Hollard, surnommé "l'homme qui a sauvé Londres" par les Anglais, a constitué le réseau AGIR en 1941 : c'est sur ses renseignements que les Anglais ont pu détruire fin 1943 les sites de lancement des missiles V1. Robert Desnos a rejoint le réseau de Michel Hollard dès juillet 1942, engagement qu'il paya de sa vie : arrêté le 22 février 1944 sur dénonciation, il meurt le 8 juin 1945 des suites de sa déportation.
Au retour des cendres du poète à Paris, le 15 octobre 1945, Paul Eluard (que Desnos n'aimait pas) prononça un discours grandiloquent et célèbre. Le discours du colonel Hollard, prononcé deux jours plus tard, probablement dans l'intimité de la légation tchécoslovaque à Paris, est tout son contraire.
vendu
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